Les 1 700 employés de l'Office français de la biodiversité (OFB) ont fait preuve de retenue pendant les manifestations agricoles, durant lesquelles les règles de protection environnementale qu'ils défendent ont été vivement contestées. Ces défenseurs de la nature ont vu leurs installations être la cible d'actes de vandalisme, allant de l'épandage de fumier aux feux de pneus.
Philippe, qui se considère comme un 'garde de la nature', travaille dans le Puy-de-Dôme en charge du respect des normes écologiques, une profession exercée depuis plus de deux décennies. Il exprime son étonnement face à l'hostilité des agriculteurs envers l'OFB, déclarant :
"Nous agissons comme des gendarmes qui garantissent le code de la route, sauf que nous sommes dans les champs pour maintenir la réglementation concernant la protection de la nature. On entend parfois dire que nous sommes un peu radicaux dans nos approches écologiques, mais ce n'est pas le cas. Il n'est jamais agréable d'être réprimandé par les autorités.
Philippe insiste sur la nécessité pour les agriculteurs de saisir que certaines de leurs pratiques vont à l'encontre de la législation. Son collègue David, qui l'accompagne dans une mission de cartographie des castors, décrit des relations généralement amicales avec le monde agricole, malgré de rares divergences. "Nous avons des échanges directs avec les agriculteurs. Nous les informons des conséquences légales possibles, ce qui peut parfois créer des tensions car les enjeux environnementaux relèvent souvent de délits et les sanctions peuvent être conséquentes," explique David qui ajoute que, jusqu'à présent, il n'a ressenti aucune crainte dans les interactions avec les agriculteurs.
David réfute également l'idée que la présence d'une arme chez chaque agent est problématique. Le Premier ministre Gabriel Attal a questionné cette pratique, pour finir par décider de maintenir l'armement sous condition d'une discrétion accrue. David affirme que ce point est un non-sujet, soulignant que les agents sont bien formés et que l'OFB n'a jamais connu d'incident avec armes à feu sur les 40 dernières années. De plus, le nombre de contrôles effectués est minime, avec seulement 2 750 inspections en 2023, affectant moins de 1% des exploitations agricoles françaises, et aboutissant à une moyenne de 13 contraventions par département et par an.
Reconstruire la confiance avec les agriculteurs
Thierry Orsière, éleveur de moutons au Puy-de-Dôme, témoigne néanmoins que les interactions avec l'OFB peuvent être tendues. Il explique sa méfiance envers les contrôles en soulignant la constante évolution des lois et réglementations, rendant difficile la certitude d'être en conformité.
"Une bonne partie des règlementations change régulièrement. On ne peut pas toujours garantir d'être informé de toutes les exigences à respecter."
La présence des armes chez les agents est également une source de préoccupation pour lui, donnant l’impression aux agriculteurs d'être perçus comme des prévenus ou des criminels. Afin de restaurer le dialogue, l'OFB a mis en place des formations sur les exploitations agricoles, bien que celles-ci restent peu fréquentes. Julie Blanchon, responsable à l'OFB dans le Puy-de-Dôme, valorise ces interactions pour une meilleure compréhension mutuelle des défis quotidiens de chaque partie.
Le sentiment d'abandon par le gouvernement
Lors de la récente crise agricole, la réponse du gouvernement fut critiquée par les agents de l'OFB. Gabriel Attal avait promis de réduire la pression des contrôles, et pendant les protestations, les contrôles administratifs furent suspendus. Véronique Caraco-Giordano, secrétaire générale du Syndicat national de l'environnement, s'insurge contre le positionnement du gouvernement qui, selon elle, aurait fait des agents de l'OFB des boucs émissaires.
"La remise en question a été si intense qu'on peut légitimement se demander si nous avons le soutien politique nécessaire, ce qui est très préoccupant."
Les syndicats s’alarment de ce qu'ils perçoivent comme des régressions environnementales inédites suite à la crise et craignent une perte de sens pour les agents passionnés par la protection de l'environnement.
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