Les effets des pesticides sur les oiseaux
Une étude menée en France à Deux-Sèvres
Selon une étude publiée fin mai dans la revue Agriculture, Ecosystems & Environment, les oiseaux sont en bien meilleure santé dans les champs bio que dans les champs traditionnels et pesticidés. Cette étude a été menée en France, à Deux-Sèvres (79), où sont répertoriées 435 fermes. Ces dernières sont documentées depuis presque 30 ans par le laboratoire de Chizé qui a permis aux chercheurs d’accéder à des données très précises.
« Tout est inventorié : si le champ est en bio ou en conventionnel, quels types de pesticides sont utilisés et dans quelles quantités ils sont épandus », a expliqué Jérôme Moreau, chercheur au laboratoire Biogéosciences de l’université de Bourgogne et coauteur de l’étude.
Grâce à ces précieuses données, ils ont déterminé une dizaine de haies en contact au milieu de champs bio et une dizaine d’autres haies entre plusieurs champs conventionnels. Seules certaines espèces d’oiseaux comme la fauvette à tête noire, le rossignol ou encore la mésange charbonnière ont été étudiées afin d’obtenir un échantillon précis et équivalent entre les deux zones.
Le test des chercheurs est plutôt simple. Installer un filet pour capturer pendant une dizaine de minutes des oiseaux et étudier leur réaction face à cette agression. Le constat est clair : les oiseaux observés sont systématiquement en moins bonne santé s’ils sont en contact avec des pesticides, même à de faibles doses.
« Je ne m’attendais pas à ce que l’on trouve sur toutes les espèces et pratiquement tous les paramètres une différence. Le signal est très fort », a confié Vincent Bretagnolle, chercheur au laboratoire de Chizé et coauteur de l’étude.
Des oiseaux « amorphes » et « apathiques »
Les conclusions ont été sans appel. L’état de santé des animaux au contact des pesticides se dégrade rapidement.
« Les tentatives de fuite, l’agressivité, le picage et les cris de détresse lors de la capture […] étaient tous plus élevés chez les oiseaux capturés dans des haies biologiques que chez ceux capturés dans des paysages conventionnels », ont décrit les auteurs de l’étude. « D’abord, les oiseaux sont beaucoup moins vigilants et détectent le prédateur plus tard. On peut imaginer des problèmes nerveux, car on sait que certaines molécules de pesticides ont ce type d’effet. L’autre hypothèse est que l’énergie mise à se détoxifier des pesticides n’est pas mise à fuir face au prédateur. »
Plusieurs des espèces étudiées sont d’ailleurs des oiseaux migrateurs. Cela signifie qu’elles sont en contact avec les pesticides pendant trois mois maximum. Une courte durée qui a pourtant suffi pour que ces oiseaux subissent les effets des pesticides épandus sur les terres.
Des oiseaux « amorphes » et « apathiques » qui posent de réelles questions sur les effets des pesticides sur la santé des Hommes également.
Un signal d’alerte précoce pour la santé humaine
« On trouve des conséquences importantes sur le comportement, la physiologie, l’écologie de ces espèces. Il faudrait aller chercher chez l’homme, les études n’ont pas encore été faites », a estimé Vincent Bretagnolle.
Observer un tel constat chez les oiseaux montre que l’environnement est systématiquement en cause, selon les chercheurs. Les oiseaux pourraient devenir un indicateur très utile pour étudier un écosystème et sa pollution aux pesticides. Les oiseaux paraissent très sensibles aux différents produits phytosanitaires, même faiblement dosés, et pourraient donc être utilisés comme un signal d’alerte.
« Mesurer le comportement des oiseaux, comme on l’a fait, est assez simple. On pourrait le faire dans beaucoup d’autres environnements en France, ce qui nous permettrait de dire s’ils peuvent être dangereux aussi pour les humains », a déclaré Jérôme Moreau.
Source : Organic farming positively affects the vitality of passerine birds in agricultural landscapes