Les sels de nitrites favorisent l’apparition de cancers digestifs. Afin de faire bouger les choses, l’ONG Foodwatch, la Ligue contre le cancer et l’application Yuka ont lancé une pétition pour faire interdire les nitrites et nitrates dans l’alimentation des Français.
Des substances reconnues « cancérogènes probables »
En 2010, le CIRC (Centre international de la recherche sur le cancer) de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) a indiqué que les sels de nitrite étaient des « cancérogènes probables » pour l’Homme, dès lors qu’il y a une « ingestion qui se fait dans des conditions permettant une nitrosation endogène ». En d’autres termes, lorsqu’elles se transforment en molécules — comme les nitrosamines par exemple — dans l’organisme.
Suite à cette annonce, de nombreux industriels ont commencé à retirer ces additifs de la composition de leurs produits. Les aliments « zéro nitrite » ou « sans sel nitrité » ont alors envahi les rayons des supermarchés.
Difficile de s’en passer selon certains industriels
Pourtant, même si ces additifs sont montrés du doigt depuis de nombreuses années et bien qu’un certain nombre d’études confirment leurs effets sur l’organisme, pour encore un trop grand nombre d’industriels, il reste très difficile de l’occulter. En effet, selon eux, les nitrates empêchent la formation de microbes générant de graves intoxications, comme le botulisme.
Un fait que ne dément pas Boris Hansel, médecin nutritionniste à l’hôpital parisien Bichat.
« La politique de réduction des nitrites est logique vu le niveau élevé de preuves entre la survenue de maladies et la molécule » avance-t-il, tout en insinuant que pour éviter toute prolifération de bactéries, « il vaut alors mieux insister sur la nécessité de respecter la chaîne du froid et de consommer rapidement les produits entamés ».
En parallèle, la Ligue contre le cancer, Yuka et Foodwatch avancent que si quelques industriels, notamment dans les produits bio, ont trouvé le moyen de s’en passer, cela prouve que les éradiquer définitivement ne relève que d’une simple question de volonté.
« Ils entraînent la formation de nitrosamines dans notre estomac, des substances cancérogènes. On considère qu’il y a peut-être plus de 4 000 cancers en particulier des colorectaux, attribuables à la consommation de viande transformée. C’est simple, il faut en finir avec les nitrites » s’insurge Axel Kahn, nouveau président de la lutte contre le cancer.
La viande transformée dans le viseur
Les sels de nitrites sont essentiellement introduits dans la charcuterie. Ils sont utilisés par exemple, pour rendre le jambon plus rose ou pour faciliter la conservation.
C’est pour cette raison que la viande transformée a également été considérée comme cancérogène avéré en 2015. En effet, les trois instigateurs de la pétition rappellent que consommer 50 g de charcuterie industrielle par jour augmente le risque de cancer colorectal de 18 %. Pour autant, la communauté scientifique reste en désaccord sur le sujet.
Comment savoir si un produit contient des nitrites ?
Les nitrites, ainsi que les nitrates sont indiqués sur les emballages sous des codes différents. Ceux que l’on retrouve le plus souvent dans la charcuterie sont le E249 (nitrite de potassium), E250 (nitrite de sodium), E251 (nitrate de sodium) et E252 (nitrate de potassium). Ils peuvent également être indiqués sous la mention « sels de nitrites ».
Qu’en pense l’État français ?
Le 24 octobre dernier, le député MoDem Richard Ramos avait proposé un amendement visant à instaurer une taxe de 10 centimes d’euros par kilogrammes sur la charcuterie contenant des nitrites ou nitrates.
Celui-ci a pourtant été rejeté, car la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, avait invoqué que la dangerosité de ces additifs n’était pas suffisamment approuvée par la sphère scientifique.
« Pour l’Agence européenne de la sécurité alimentaire, il n’y a pas d’association entre l’ingestion de nitrates et la survenue de la plupart des cancers. L’effet néfaste serait dû à la transformation des nitrates en nitrite, mais cette conversion dans l’organisme humain est très variable et insuffisamment documentée » avait-elle avancé.
Pour information, des travaux sur le sujet sont en cours à l’Anses. Mais la Ligue contre le cancer, Foodwatch et Yukka font valoir le principe de précaution.
« Nous voulons manger sans nous exposer à un potentiel risque de cancer », indique Foodwatch.
Une pétition directement adressée à la ministre de la Santé
Les conséquences sanitaires sont importantes. Les trois organisations unissent leurs voix pour défendre la santé des Français.
« Il faut tout simplement interdire leur ajout dans nos denrées alimentaires, car lorsqu’on les ingère, ils peuvent entraîner la formation de composés cancérogènes dans notre estomac : les nitrosamines ».
Jugeant que cette responsabilité dépend directement des autorités publiques, les trois initiateurs ont décidé de se faire entendre par le biais d’une pétition.
Celle-ci est directement adressée à Agnès Buzyn, ministre de la Santé, à Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, ainsi qu’à Didier Guillaume, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation.
Pour Camille Sorioz de l’ONG Foodwatch :
« C’est la responsabilité des autorités publiques de renforcer les règles en interdisant tous les additifs reconnus dangereux ».
La pétition enregistre actuellement plus de 46 000 signataires.