L'éclat solaire règne sur Baixas, dans les Pyrénées-Orientales, et la chaleur s'accentue même en matinée. René Calmon, viticulteur, parcourt son domaine et lève les yeux vers un ciel azur, exempt de nuages. "On pourrait croire que les dieux nous ont abandonnés", déplore-t-il. "C'est tragique, il n'a quasi pas plu depuis deux ans." Ces conditions climatiques désastreuses affectent ses 25 hectares de vigne, des terres qui fournissent des vins comme le côtes du roussillon et le muscat de rivesaltes.
Depuis près de deux ans, le département subit une sécheresse sans égal. En 2023, il a été enregistré seulement 245 mm de précipitations, bien loin des 560 mm considérés comme la normale. Pour le seul mois de janvier, le manque de précipitations a atteint 80%, une situation alarmante.
La terre desséchée et impitoyable se présente comme en plein cœur de l'été, d'après les constatations de Météo-France, et les réserves aquifères sont signalées à un niveau alarmant par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Jean Bertrand, chargé de la gestion de l'eau à la chambre d'agriculture locale, avoue son inquiétude : "Les vignerons sont les plus sinistrés, faute de moyens pour lutter contre la sécheresse. Tandis que les arboriculteurs et maraîchers ont recours à des systèmes d'irrigation, l'attente se fait désespérée pour la pluie." Bien que la préparation soit meilleure comparée à celle de 2023, la situation reste préoccupante pour le secteur agricole.
René Calmon, entre les rangées de vignes asséchées, raconte la fatigue des plants pour trouver de l'eau. Les symptômes de la sécheresse sont visibles : "Regardez ces terres arides, aucune herbe n'a germé," indique-t-il en montrant un cep desséché. Une taille récente n'a produit que des sarments d'une trentaine de centimètres, alors qu'en temps normal ils atteignent 1,20 mètre. Après une récolte médiocre, la crainte majeure est que la suivante soit catastrophique.
"Si ça perdure, nous aurons moins de la moitié de la récolte de l'année passée. Nous prions donc pour la pluie. Certaines exploitations sont au bord du gouffre, avec des dettes écrasantes."
René Calmon, viticulteur à Baixas
Le viticulteur confie que ses revenus ont chuté de 3 000 à 1 000 euros par mois en quinze ans. Près de la retraite, il s'alarme pour l'avenir : "Une vigne c'est toute une existence. Si elle dépérit, c'est comme si l'héritage de nos aïeuls mourait avec."
Malgré une aide d'urgence allouée aux agriculteurs et une promesse préfectorale d'assistance financière pour les éleveurs, de nombreux exploitants se sentent délaissés, arrachant parfois vignes et arbres ou organisant des manifestations sur les routes.