Gagner jusqu’à un mois sur la floraison normale d’une plante, c’est exactement ce qu’arrivent à faire les bourdons qui ressortent de leur hibernation plus tôt que la normale. Affamés, ils mutilent alors les plantes pour que celles-ci produisent du pollen plus rapidement.
Une avance sur l’hibernation
Le saviez-vous ? Les bourdons hibernent ! Ils sortent de leur léthargie au début du printemps, moment où les fleurs commencent à produire du pollen. Mais avec le changement climatique et le redoux qui ne crée pas de véritables hivers, les bourdons émergent plus tôt que la normale.
En se réveillant, ils ont alors une faim de loup, mais se trouvent vite déconcertés en constatant que les fleurs sont encore inexistantes. Nombre d’individus meurent alors de faim. Pour faire face à cette tragédie, les bourdons ont développé une toute nouvelle technique, visant à accélérer la floraison des plantes pour survivre.
Des trous dans les feuilles
Des chercheurs à l’ETH de Zürich en Suisse ont pu observer des bourdons ouvriers sortant de leur hibernation, sans avoir de quoi se nourrir faute de pollen. Le spectacle était grandiose ! Affamés, ils ont alors commencé à utiliser leurs pièces buccales pour creuser des trous dans les feuilles des plantes.
Consuelo De Moraes et ses collègues ont alors décidé de mener une expérience en laboratoire, mais aussi dans la nature afin de mieux comprendre ce comportement inédit. Ils ont alors planté des plants de moutarde noire sous serre. Dix d’entre eux ont été placés dans des filets avec des bourdons affamés depuis 3 jours. Ils ont pu observer que les bourdons avaient alors attaqué les feuilles des plantes en les trouant entre 5 et 10 fois. En moyenne, les plants ont alors fleuri environ 17 jours plus tard.
Les mêmes plantes ont été exposées plus loin, à l’abri des bourdons et celles-ci ont pris près de 33 jours pour donner naissance à des fleurs. Pour des résultats plus probants, l’expérience a également été réitérée avec des plants de tomates. Les résultats ont été identiques : les plants en contact avec les bourdons ont été grignotés et leur floraison est survenue 30 jours plus tôt que ceux mis à l’écart.
Les bourdons élevés en captivité et ceux observés dans la nature ont adopté la même méthode, indiquant alors une capacité d’adaptation totalement incroyable de la part du bourdon.
Les chercheurs ont cependant un doute quant au fait que d’autres pollinisateurs comme les abeilles ouvrières puissent agir de la même façon. En effet, leur durée de vie étant d’un mois, elles ne pourraient profiter du résultat de leur travail. Cette technique resterait donc pour le moment propre aux bourdons.
Un phénomène encore jamais observé par les chercheurs
Les scientifiques ignorent la corrélation entre les trous effectués dans les feuilles et le phénomène de floraison anticipé. Cependant, ce que l’on sait, c’est que certaines plantes en situation de stress produisent une floraison anticipée.
L’équipe de Consuelo De Moraes a alors décidé de percer des trous de diamètre similaire dans les feuilles d’autres plants, afin de vérifier si cette action permettrait un résultat identique. Contre toute attente, le résultat a été positif. Les plantes concernées ont fleuri plus tôt que les autres. Cependant, elles ont fleuri plus tard que celles grignotées par les bourdons.
En conclusion, les chercheurs pensent que les bourdons transmettent aussi un signal à la plante, afin d’encourager sa floraison anticipée. Pour eux, une substance contenue dans leur salive pourrait être la clé. Une étude est en train de se dérouler sur cette découverte.