Dans ce long-métrage américain avec pour têtes d’affiche Léonardo DiCaprio et Jennifer Lawrence et réalisé par Adam McKay, le message subliminal est une référence à l’urgence climatique actuelle.
Des parallèles avec l’urgence climatique
Ce film « Don't Look Up » est une satire féroce des dirigeants politiques, pointés du doigt pour leurs lâchetés et leur inaction. Le système médiatique est aussi taillé en pièce. Plusieurs scientifiques ont eu l’occasion de regarder le film. C’est le cas de Valérie Masson-Delmotte, coprésidente du GIEC (le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), qui a vu la dernière production de Netflix en famille.
J'ai regardé en famille #DontLookUp pendant les vacances... et rapidement entendu "eh, maman, c'est la même chose que pour le changement climatique!"
— Dr Valérie Masson-Delmotte (@valmasdel) January 4, 2022
Je voudrais partager quelques réflexions, au regard de certaines expériences à l'interface science / société...
La scientifique indique avoir noté de nombreux points communs avec ce qu’elle ressent depuis longtemps. « La forme de désespoir à ne pas parvenir à se faire entendre. La façon dont on est perçue. Je me souviens d’avoir été frappée par le titre d’un portrait dans Le Monde il y a quelques années. On m’avait nommé “passionaria” et la façon dont cette scientifique féminine est traitée m’a remémoré cet épisode », indique-t-elle.
C’est la fin du monde. Et alors ?
— Netflix France (@NetflixFR) September 25, 2021
Don’t Look Up: Déni cosmique, le 24 décembre. #TUDUM pic.twitter.com/11XoMVUilL
Une œuvre qui dénonce le cynisme des puissants
Valérie Masson-Delmotte a aussi reconnu le cynisme dont font preuve souvent les dirigeants politiques et économiques, mais aussi la folie des médias, qui ne saisissent pas forcément les enjeux : « ça m’a rappelé la sortie du rapport du GIEC cet été, le 9 août. On avait en même temps l’arrivée de Lionel Messi au PSG ».
La question de la communication est l’un des enjeux forts du film. Pour François-Marie Bréon qui travaille au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement :
« un scientifique est payé pour faire de la recherche, écrire des articles, il n’a pas cette mission de communiquer auprès du grand public, de s’exprimer dans les médias, indique-t-il au média 20 minutes. C’est très bien qu’une partie d’entre nous acceptent de le faire, pour clarifier ce que dit la science, démentir des fausses informations ».
Par ailleurs, l’océanographe Jean-Baptiste Sallée, chercheur CNRS au Laboratoire d’Océanographie et du Climat à Sorbonne Université, a aussi vu le film et a pu donner son point de vue, toujours sur le site de 20 minutes.
« Si le film est une caricature grossière des enjeux/tensions/inaction au sujet du changement climatique (…), c’est une superbe caricature de la “folie de ce monde” et de l’approche futile, légère et souvent intéressée de certains médias et politiques sur ce sujet. »
Un climatologue de la NASA salue le film
D’autres scientifiques ont eu l’occasion de réagir à cette œuvre.
« C’est le film le plus précis que j’ai vu sur l’absence terrifiante de réponse de la société au dérèglement climatique », note Peter Kalmus, climatologue qui travaille pour la NASA, à l’occasion d’un texte relayé par le journal britannique The Guardian, qui s’appelle « Don't Look Up capte la folie que je vois tous les jours ».
Le climatologue Michael E. Mann, qui a inspiré l’un des protagonistes de l’œuvre considère de son côté que « le film est une métaphore puissante de la crise climatique en cours », à l’occasion d’une interview accordée au journal Le Monde. Il dit que la société sous-estime la gravité de la crise climatique. Il estime que le film montre bien « la manière dont les preuves accablantes d’une menace sont ignorées pour des raisons politiques et idéologiques ». Mais Michael E. Mann continue sa croisade pour alerter : « nous devons à la fois souligner l’urgence et la capacité à agir, transmettre à la fois la gravité de la menace et les options dont nous disposons pour y faire face ».
Le film fait un carton sur Netflix
Le film est un très gros succès. En effet, la superproduction américaine se place dans le top 3 des films les plus regardés de la plateforme devant The Irishman de Martin Scorsese et continue sa progression. Un vrai phénomène ! Sur les réseaux sociaux, de nombreuses personnes le recommandent à leurs abonnés.
De nombreux hommes et femmes politiques ont eu l’occasion de le regarder ces derniers jours et de souligner le fait qu’il défendait une vision pertinente des menaces climatiques actuelles. Netflix annonce un chiffre brut de 263 millions d’heures vues en une dizaine de jours de mise en ligne. Don't Look Up compte aussi des nominations aux Critics Choice Awards et aux Golden Globes.
Don't Look Up ne fait pas l’unanimité
Au sein de la communauté des chercheurs, certains montrent moins d’enthousiasme. C’est le cas du sociologue Stéfan Ayjut, expert en politiques climatiques et qui travaille à l’Université de Hambourg.
« Comme métaphore pour le problème climatique, il fonctionne peu, car la comète, au final, il suffit de prendre une décision à un moment donné pour l’arrêter. Mais, pour le climat, c’est des centaines de décisions, sur du long terme. Il me semble que l’image de l’astéroïde masque un peu cette diversité sociétale qu’il faut mobiliser pour faire face au changement climatique ». L’homme reconnaît toutefois la vertu d’ouvrir le dialogue sur le sujet.