Climat : le nouveau rapport du GIEC 2022 en 4 points clés Lecture : 9 min
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Climat : le nouveau rapport du GIEC 2022 en 4 points clés

Le 28 février, le GIEC a publié la deuxième partie de son 6ème rapport d’évaluation, consacrée aux conséquences réelles du changement climatique sur l’humanité, les écosystèmes, l’habitat ou encore les moyens de subsistance. Le GIEC est composé de 3 groupes de travail, chacun se concentrant sur un volet du rapport. Le premier volet de ce 6ème rapport, centré sur la physique du climat, est paru en août 2021, et le 3ème volet, qui exposera les moyens d’atténuer le réchauffement climatique, est attendu pour le mois d’avril 2022. Quels sont les points clés de ce nouveau rapport ?

Près de la moitié de la population est particulièrement exposée au changement climatique

Le 2ème volet du nouveau rapport du GIEC, établi à partir de 34 000 études scientifiques et rédigé par 270 spécialistes de 67 pays, est encore plus inquiétant que le précédent rapport, paru en 2014. Les conséquences du changement climatique sont désormais concrètes, notamment pour les 3,3 à 3,6 milliards de personnes qui y sont particulièrement exposées.

 

En effet, si « le changement climatique est une menace globale face à laquelle tous les humains et les écosystèmes sont vulnérables », certaines populations vivent dans des contextes qui renforcent cette vulnérabilité. C’est notamment le cas des personnes qui n’ont pas accès aux services de santé, qui vivent dans une pauvreté extrême, qui sont déracinées, en insécurité alimentaire, avec un taux d’alphabétisation faible ou encore confrontées à l’absence d’infrastructures essentielles.

En se basant sur ces différents critères, le GIEC constate que le continent africain est la région du monde la plus vulnérable face au changement climatique, alors même qu’il s’agit d’une de celles ayant le moins contribué aux émissions de gaz à effet de serre.

À l’inverse, 1,8 milliard de personnes vivent dans des pays considérés comme peu ou très peu vulnérables face au changement climatique. Ainsi, le taux moyen de mortalité liée aux inondations, aux sécheresses et aux tempêtes est 15 fois plus élevé dans des pays très vulnérables comme la Somalie, le Nigéria, le Mozambique, Haïti ou l’Afghanistan que dans des pays peu vulnérables comme le Royaume-Uni, le Canada, la Suède ou l’Australie.

Or, d’ici 2050 et 2100, la population vivant dans des pays vulnérables va considérablement augmenter, tandis que celle vivant dans des pays peu vulnérables va diminuer ou augmenter de façon très faible.

« Avec un réchauffement climatique de 1,7 °C d’ici 2050, 17 à 40 millions de personnes pourraient migrer à l’intérieur de l’Afrique subsaharienne, ce chiffre passant à 56-86 millions pour 2,5 °C », chiffre le rapport, qui précise toutefois qu’aucune région du monde n’est épargnée par le changement climatique, et que tous les pays ont pris du retard dans la mise en place de politiques d’adaptation.

En tout, il pourrait y avoir d’ici 2050 environ 143 millions de déplacés climatiques supplémentaires, en comptant seulement l’Amérique latine, l’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud-Est.

 

Des conséquences irréversibles si le réchauffement climatique dépasse 1,5 °C

À l’heure actuelle, les engagements pris par les différents pays du monde en faveur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre laissent prévoir un réchauffement climatique compris entre 2,3 et 2,7 °C.

Or, au-delà de 1,5 °C, le réchauffement climatique pourra avoir des impacts irréversibles, même si la tendance peut par la suite être inversée. De nombreuses populations et écosystèmes seront confrontés à des risques accrus, qui peuvent être si graves qu’ils ne permettront plus de s’adapter.

Toutefois, même si le réchauffement climatique se maintient sous la barre de 1,5 °C, des conséquences graves impacteront les populations et les écosystèmes. Selon le rapport du GIEC, les enfants âgés de 10 ans ou moins en 2020 connaîtront une augmentation de près de 4 fois plus d’événements climatiques extrêmes d’ici 2100 si le réchauffement ne dépasse pas 1,5 °C, et de 5 fois plus s’il se rapproche des 3 °C.

« À l’échelle mondiale, le pourcentage de la population exposée à un stress thermique mortel devrait passer de 30 % aujourd’hui à 48 % à 76 % d’ici la fin du siècle, selon les niveaux de réchauffement et l’emplacement », préviennent les scientifiques, précisant que « en Europe, le nombre de personnes exposées au stress thermique sera multiplié par deux ou trois à 3 °C par rapport au réchauffement de 1,5 °C ».

Les jeunes générations et les générations à venir seront également confrontées aux conséquences du changement climatique sur la production de nourriture et la disponibilité des aliments. Plus la température se réchauffera, plus il sera difficile de produire, transporter, distribuer, acheter et stocker de la nourriture. Les populations les plus pauvres seront, là encore, les plus durement touchées.

Le GIEC estime que, selon les mesures prises par les États, jusqu’à 80 millions de personnes pourraient souffrir de la faim en 2050, essentiellement en Asie du Sud, en Amérique latine et en Afrique subsaharienne. Si le réchauffement climatique est plus élevé, ce nombre pourrait atteindre 183 millions de personnes.

L’adaptation doit aller de pair avec la réduction des émissions de gaz à effet de serre

Si les mesures d’adaptation sont une des clés pour réduire les conséquences du changement climatique, elles ne sont toutefois pas suffisantes, prévient le GIEC, qui insiste sur l’importance de les coupler avec des « réductions ambitieuses des émissions de gaz à effet de serre ». « Avec un réchauffement accru, l’efficacité de nombreuses options d’adaptation diminue », expliquent les scientifiques.

D’après le rapport, les mesures prises pour réduire les risques climatiques et permettre aux humains et aux écosystèmes de s’adapter sont insuffisantes, faute d’information fiable, d’engagement politique ou de financement.

 

Pourtant, de nombreuses mesures pourraient permettre d’atténuer l’impact du changement climatique, par exemple la réorganisation des villes et des infrastructures pour permettre le stockage de l’eau. Renforcer la sécurité alimentaire, investir dans la santé, le bien-être et l’innovation, s’assurer de la productivité à long terme de la pêche et de l’agriculture éviterait des dépenses beaucoup plus importantes à l’avenir.

Les mesures d’adaptation peuvent consister, pour les grandes villes, à créer de nouveaux parcs et des lacs pour que les habitants puissent profiter de la fraîcheur de ces lieux pendant les vagues de chaleur. En revanche, elles ne sont pas toujours suffisantes : les populations vivant sur de petites îles, qui se retrouvent confrontées à l’élévation du niveau de la mer et au manque d’eau douce, n’ont d’autre choix que de partir.

Par conséquent, les mesures d’adaptation sont nécessaires, mais ne sont pas à elles seules suffisantes. D’autant que la pauvreté et les inégalités sociales rendent parfois impossible l’adaptation pour certains groupes de populations plus vulnérables, à savoir selon le rapport du GIEC « les femmes, les jeunes, les personnes âgées, les minorités ethniques et religieuses, les autochtones et les réfugiés ».

En effet, « le changement climatique est susceptible de les forcer à passer de l’agriculture, principale source de revenus, à d’autres formes de travail salarié, ce qui aura des répercussions sur la migration de la main-d’œuvre et l’urbanisation », détaillent les scientifiques.

L’importance et l’urgence du développement résilient au climat

Le rapport du GIEC insiste sur l’importance et l’urgence à œuvrer en faveur d’un monde résilient aux changements climatiques. Les scientifiques proposent pour cela un cadre de solutions nommé « développement résilient au climat », ou « Climate Resilient Development » en anglais.

Concrètement, il s’agit d’un ensemble de mesures permettant de combiner les stratégies d’adaptation au changement climatique et les politiques de réduction d’émissions de gaz à effet de serre. Ce concept de développement résilient au changement climatique doit être mis en application dès maintenant : si le réchauffement dépasse le seuil des 2 °C, il ne pourra plus être mis en œuvre dans certaines régions du monde.

Les humains, les infrastructures et les écosystèmes sont menacés par le réchauffement climatique, et par une série de phénomènes comme la surconsommation, le recul de la biodiversité, la croissance démographique, l’urbanisation croissante, les inégalités et la pauvreté. Il s’agit donc d’apporter des réponses globales, prenant en compte ces différents enjeux de façon simultanée.

En agissant sur l’un de ces enjeux, on contribue également à apporter une réponse aux autres, « par exemple, en réduisant la pauvreté et la faim, en améliorant la santé et les moyens de subsistance, en fournissant à davantage de personnes de l’énergie et de l’eau propres et en sauvegardant les écosystèmes sur la terre, dans les lacs et les rivières et dans l’océan », explique le rapport.

Le développement résilient au climat consiste, pour les États, à prendre en compte à la fois les questions d’alimentation, d’eau, de logement, de transport, d’énergie, d’industrie, de santé et de développement urbain, pour s’assurer qu’une action dans l’un de ces domaines n’entraîne pas de conséquences négatives sur un autre.

« Cibler un monde résilient et durable sur le plan climatique implique des changements fondamentaux dans le fonctionnement de la société », insistent les auteurs du rapport du GIEC, qui affirment que « les choix que nous ferons au cours de la prochaine décennie détermineront notre avenir ».