Des voix se lèvent au sein du groupe EDF pour contester un ambitieux programme saoudien de création d'une centrale hydroélectrique au sein de la mégapole Neom, qualifié par certains de projet d'écocide.
Photo non contractuelle
Germination du mécontentement chez EDF
Dans les coulisses du géant de l'électricité français, l'émulsion est palpable face à un défi baptisé Nestor : implanter une centrale hydroélectrique au cœur d'un environnement aride, une entreprise gigantesque à l'intérieur du vaste chantier de Neom.
Dévoilé par l'équipe d'investigation de Radio France, ce projet a suscité bien des effarements parmi les salariés d'EDF, inquiétudes motivées par l'envergure déraisonnable du projet urbain saoudien auquel ils sont censés contribuer.
Neom : un paradoxe environnemental et éthique
Annoncé en grande pompe par Mohammed ben Salmane, prince héritier saoudien, en 2017, Neom est conçu pour être une vitrine d'innovation et de technologie. Il témoigne d'une ambition de rompre avec la dépendance au pétrole, dans un paysage où s'ébauche une station de ski, une île touristique de luxe et The Line, une imposante « ville verticale ».
"En Arabie saoudite, on a un gros problème de transports en commun et d'infrastructures, notamment pour la gestion des eaux usées. Il y a aussi un problème d'accessibilité au logement. Neom va certes créer des logements, mais ce seront des logements chers", soulignant une contradiction importante : EDF, entreprise primairement au service du public, s'enrôle dans la fabrication d'une centrale qui doit alimenter une ville qui semble plus destinée à l'élite économique qu'au peuple saoudien.
Nombre d'employés sont troublés par les directions prises par leur société, jugées antinomiques avec les valeurs environnementales et la mission de service public que promeut EDF. En effet, The Line est prévue pour fonctionner uniquement à l'énergie renouvelable, une initiative écologiquement louable, mais les coulisses révèlent des compromis discutables, voire des transgressions éthiques flagrantes.
Des pratiques internes à l'épreuve
Le malaise interne croît autour de la gestion de ce dossier. Selon des témoins au sein de l'entreprise, il existe une pression implicite qui laisse entendre que la progression professionnelle est conditionnée par l'acceptation de travailler sur Neom, une situation qui rappelle, de façon déplaisante, le mode managérial décrié de France Télécom dans les années 2000.
Cependant, la direction d'EDF nie toute contrainte exercée sur ses agents. Elle prétend respecter les convictions de chacun en offrant la possibilité de ne pas s'impliquer dans le projet contesté et d'évoluer vers d'autres tâches au sein de l'entreprise.
Impacts et controverses
Le projet, validé par la signature d'un contrat avec l'Arabie saoudite, s'accompagne d'engagements éthiques. Pourtant, il exacerbe les interrogations sur l'impact environnemental de la construction de Neom et sur l'implication de grandes entreprises dans des initiatives à l'étranger qui semblent s'éloigner de leur mission première.
"Nos effectifs en hydro sont limités. On s'engage dans un projet discutable à l'étranger au lieu d'investir dans des projets de centrales hydroélectriques en France qui seraient nécessaires à la souveraineté énergétique de notre pays", déplore un cadre d'EDF, reflétant ainsi le conflit interne entre la poursuite de projets internationaux douteux et la fidélité aux valeurs de service public et aux besoins nationaux.
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