Comment réutiliser la chaleur des data centers pour chauffer nos villes : une solution oubliée Lecture : 3 min
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Comment réutiliser la chaleur des data centers pour chauffer nos villes : une solution oubliée

Les data centers se multiplient à grande vitesse sur le territoire français. Ces gigantesques entrepôts numériques, qui alimentent nos services connectés, génèrent une quantité colossale de chaleur pour rester opérationnels. Une chaleur dite « fatale », encore largement oubliée et gaspillée… alors qu’elle pourrait être réutiliséé et servir à chauffer dans nos villes des millions de logements. Un non-sens environnemental à l’heure de la transition énergétique.

Une explosion du numérique, mais à quel prix ?

La France compte aujourd’hui plus de 300 data centers, et ce chiffre ne cesse de croître. Pour répondre à la demande galopante de l’intelligence artificielle et du cloud, le gouvernement prévoit 35 nouveaux projets. Cette course au numérique est soutenue par des mesures de simplification administrative qui facilitent leur implantation, souvent au détriment des règles environnementales et de la participation citoyenne.

Le paradoxe ? Ces mastodontes technologiques sont extrêmement énergivores. Un seul centre peut consommer autant qu’une ville moyenne comme Rouen ou Bordeaux. Or, pour fonctionner, ces installations doivent être refroidies en permanence, ce qui génère une chaleur constante... actuellement perdue.

Une ressource sous nos yeux

Cette chaleur dite « fatale » pourrait pourtant être valorisée. À proximité des zones urbaines ou industrielles, elle serait idéale pour alimenter les réseaux de chaleur urbains. En Île-de-France, les projets de data centers installés ces dernières années auraient pu chauffer un million de logements. Et ce n’est qu’un début : les nouvelles installations pourraient produire 100 TWh de chaleur par an, soit largement plus que les besoins en chauffage du Grand Paris.

Cette perspective est d’autant plus intéressante que le chauffage des bâtiments représente une part énorme des émissions de gaz à effet de serre. Pourtant, malgré une obligation légale depuis 2021 d’étudier la récupération de chaleur pour chaque nouveau centre, la plupart des projets se contentent d’un affichage théorique, sans mise en œuvre concrète.

Des freins techniques… et politiques

La récupération de chaleur n’est pas une mince affaire. La température générée (autour de 30 °C) est souvent insuffisante et nécessite des installations supplémentaires pour la rendre exploitable. Ces ajustements, coûteux, doivent être anticipés dès la conception du data center. Résultat : sans planification commune entre collectivités, promoteurs et opérateurs, la chaleur continue de se perdre.

Par ailleurs, la localisation des centres en périphérie, là où le foncier est moins cher, complique leur raccordement aux réseaux de chaleur existants. À Wissous, un futur data center d’une capacité gigantesque ne prévoit aucun dispositif de réutilisation, faute de réseau à proximité et de budget communal.

Vers une meilleure intégration dans les villes

Quelques exemples montrent pourtant que des alternatives sont possibles. À Saint-Denis, la chaleur d’un data center alimente déjà la piscine olympique. Des projets similaires, bien pensés dès le départ, peuvent faire émerger une nouvelle approche énergétique. L’enjeu est de taille, car la consommation électrique des data centers devrait tripler d’ici 2035, pesant jusqu’à 4 % de la consommation nationale.

Pour y parvenir, il faudra que les collectivités prennent leur place dans la planification. Installer un data center ne peut plus se faire sans penser à son utilité locale. Il faut en finir avec le réflexe de les reléguer loin des regards, au détriment de leur potentiel énergétique.

Dans une période où chaque kilowattheure compte, la chaleur des data centers ne doit plus être considérée comme un déchet, mais comme une ressource. Encore faut-il que les décisions politiques, locales comme nationales, suivent cette vision.

 

Image OpenIA